Soeur Marie-Françoise nous prie d'insérer sa réponse à l'article du Dauphiné Libéré :
NOTE SUR L'ORIGINE DE LA RESTAURATION DE L'ÉGLISE ABBATIALE CISTERCIENNE DE
LEONCEL ET SUR SON AVENIR, par Soeur Marie Françoise Giraud,
A PROPOS DE L'ARTICLE DE MADAME BEDROSSIAN DU DAUPHINE LIBÈRE DU 26 AOUT 2003
Madame Bedrossian a signé un article- interview, enthousiaste et chaleureux,
dans le Dauphiné Libéré du 26 août 2003,.visiblement inspiré par
l'Association des Amis de Léoncel. Cependant il peut laisser croire que cette
restauration serait tombée du ciel, " ... une belle aventure humaine
commencée en 1974. (par) une poignée d'amoureux (qui) décident alors de lier
leur destinée au sort de la jolie dame cistercienne". La réalité est
toute autre: une poignée d'amoureux ne tombe pas du ciel, un beau jour,.et
c'est bien, seule, que j'ai pris l'initiative de restaurer l'abbaye de Léoncel.
La Presse, la Radio, la Télévision, l'opinion courante... s'en sont fait l'écho,
amplement, en son temps. Personne n'y avait pensé auparavant. Seul le Père
Fulachier, alors professeur au Lycée Saint Maurice à Romans, avait rédigé
une petite brochure orange sur l'abbaye. On allait à Léoncel au temps des
gentianes surtout ou le lundi de Pentecôte pour la fête du sel.. Personne,
donc, avant ce jour pluvieux du printemps 1974 où je montais à Léoncel pour
la première fois, avec quatre amis, dont Basile Mensah, un ami Béninois. Nous
venions de Buis-les -Baronnies. C'est Hélène Péronnet, aujourd'hui décédée,
qui me montra les premières images de l'abbaye de Léoncel. Le Père Gineys,
aujourd'hui en charge de la paroisse Saint Pierre des Monts du Matin, alors
vicaire à Buis-le-Baronnies, m' apprit les rudiments de son histoire, telle
qu'elle était enseignée au Grand Séminaire: j'ignorais tout de Léoncel!
Personne n'en parlait. C'est le Père Méry, curé du Buis, décédé, qui
m'invita à faire part à Monseigneur Jean de Cambourg, alors évêque de
Valence, de mon désir d'un ministère dans une petite paroisse sans prêtre.
J'appartiens depuis 1942 à la famille dominicaine. Il m'ajouta: "Il n'aura
que l'embarras du choix!" Nous avons évoqué Léoncel comme possibilité.
Nous étions entrés sans peine, il n'y avait pas de clé; l'église était
verte de mousse, des perles d'humidité coulaient des murs.. Nous en sommes
ressortis, même sans en faire le tour: une chape glaciale nous tombait sur le
dos.. Cependant Basile Mensah me détermina fermement, une main sur mon épaule...
Je fis visite, en face, à l'Auberge du Bon Air. Paul et Odette Bodin nous
accueillirent avec une amitié qui ne se démentira jamais. J'allais voir
ensuite, à côté, André Bouchet, le Maire, aujourd'hui décédé. Lui comme
le Père Vial, que j'allais voir ensuite, à Beaufort-sur-Gervanne, sur la route
du retour au Buis, me découragèrent vivement, avec une certaine mauvaise
humeur: "Il n'y a rien à faire".."J'y vais tous les quinze
jours."."Vous n'y passerez pas un hiver"..."Le Père Vial
monte tous les quinze jours, c'est bien suffisant"..avait confirmé André Bouchet ... C'est l'épouse du
Maire qui sauva la situation en me montrant un gîte rural, tout neuf, dans le
vieux bâtiment des moines, occupé par la mairie. La commune venait d' achever
la restauration de ce bâtiment; elle venait de créer des gîtes ruraux. On se
demandait s'il viendrait assez de monde... je serais au moins une occupante
assurée ... ü y avait six gîtes dont un au rez-de-chaussée, derrière de
belles colonnes récemment découvertes. C'était l'ancien presbytère. Elles ne
furent pas étrangères non plus à ma décision.. C'est celui que j'allais
occuper, pendant vingt-neuf ans, et jusqu'à ce jour. Avec Mgr. de Cambourg,
quelque peu sceptique, quelques jours plus tard, je décidais d'un essai, d'un
mois d'abord, d'un an ensuite, j'y suis encore!!
Dès le mois de septembre, après avoir rencontré l'architecte des Bâtiments
de France, Mr.Pouradier Duteil, la Commission d'Art Sacré, avec le P.Férier et
la Societé d'Archéologie de la Drôme, les Etudes Drômoises, la Societé de
Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme, avec Mr.Vallentin du Cheylard, le
Père André Blanc au nom de l'Evéché etc. Hélène Péronnet me fit rencontrer
des Drômois susceptibles d'être intéressés par une restauration Léoncel était
un but de promenade ou le rendez-vous des chasseurs Charles et Lucienne Sauvajon,
leur fils Paul, d'autres personnalités, furent vivement intéressés par ma
venue. Le bouche à oreille fonctionna très vite Je revis Mgr. de Cambourg. IL
me conseilla de créer une "Association d'Amis de Léoncel', à but
culturel et non confessionnelle, afin de m'aider dans une entreprise qui, débordant
un ministère religieux, allait s'avérer au-delà de mes moyens. Il s'en fera
le premier membre donateur et me donnera 100.000frcs. d'alors, pour
l'association Celle-ci réunit très vite, chez Hélène Péronnet, puis chez
Charles et Lucienne Sauvajon, une équipe d'une douzaine de personnes
enthousiastes .Nous avons demandé à Claude Bady, notaire à Valence et amie
des Sauvajon, de prendre la présidence et de déclarer l'association. Je possède
l'original de la parution au Journal Officiel en date du 29/11/74 ainsi que tous
les comptes-rendus de nos premières réunions. Hélène et Lucienne firent
office de secrétaires, sur un cahier d'écolier Mr.Lefort, ou Mr. Laporte, de
la Gare de Valence, devint trésorier,.Mr. Mathieu etc Les réunions eurent lieu
chez les Sauvajon ou chez Hélène Péronnet Gérard Ermisse, archiviste de la
Drôme, nous accueillit par la suite aux Archives. Il fût un précieux
conseiller et édita le premier poster en sépia, avec une très ancienne photo
des Archives Des premiers Amis de Léoncel, beaucoup nous ont quittés et sauf
Claude Bady et moi-même, peut-être d'autres?? plus personne n'a connu ces
quinze premières années de l'Association, vécues dans l'enthousiasme et où
jaillissaient les projets .Années d'intense activité: chantiers des toitures,
création des premiers concerts avec Georges de Kernel; publication des trois
premiers feuillets historiques que je rédigeais à l'intention de nos
visiteurs. Je rédigeais de même le premier "Voir Léoncel".Plus
tard, j'éditerai, à compte d'auteur, le premier livre sur Léoncel:"Léoncel
Abbaye Cistercienne". Mais les Amis de Léoncel n'y ont pas participé . Ce
travail de mise en page et d'illustration soigné, fut possible grâce au Père
Grach d'Allex. Les Amis de Léoncel publiaient un très beau numéro de la
Manufacture.
Ce qui allait devenir la" Maison Saint Hugues" était la partie méridionale
de ce qui restait des bâtiments conventuels. Ceux-ci appartiennent à la Commune. Cette partie était
très délabrée, mais en vente, sous conditions je demandais au diocèse de Valence de l'acheter,
en 1989.
La COSME y participa pour un peu moins de la moitié. Puis le diocèse fit le
gros oeuvre,
tandis que la COSME l'équipait entièrement. Par accord tacite, le diocèse
propriétaire, la
COSME gestionnaire, permirent à la Maison Saint Hugues de jouer à plein son rôle
d'accueil,jusqu'en septembre 2002. . Depuis 1974, sur place, hivers comme étés, la
Communion Sainte Marie de l'Église a assuré l'accueil, les visites en plusieurs langues européennes,
tout en poursuivant la mise en état des abords de l'église, la création d'une grande
prairie à l'arrière,permettant de jouir de la pure beauté des absides Les Amis de Léoncel ne
furent pas présents à cette vie quotidienne sur place, qui assura la grande vitalité du site. Par
ailleurs, ils ont poursuivi, depuis 1983,une oeuvre historique considérable et de grande qualité,
par les colloques annuels et la parution, exceptionnelle pour sa longévité, des
Cahiers de Léoncel.
Michel Wuchsléguer en est l'artisan passionné, minutieux, rigoureux Sa compétence
est
indiscutée
De 1985 à 1994 se sont succédés d'inoubliables célébrations, depuis celle
du quinzième
centenaire de saint Benoit, en 1985, du huitième centenaire de saint Bernard en
1987 , du
huitième centenaire de la consécration de l'abbatiale en 1988, jusqu'au huitième
centenaire de la mort de saint Hugues de Chateauneuf et de Bonnevaux, troisième abbé de Léoncel,
en 1994 Ce fût l'occasion d'un très beau"" Son et Lumière", grâce
à une équipe lyonnaise quasi bénévole Depuis, il n'y eût plus de ces solennités, historiques et
religieuses, qui rassemblaient des foules autour des Moines et Moniales de la Drôme , de l'Isère, et
jusqu'aux cisterciens de Tamié en Savoie.
L'abbatiale de Léoncel s'était endormie lorsque je suis venue la prendre par
la main; elle eût un beau réveil. Elle s'est assoupie, quelque peu à nouveau. Ces grandes
manifestations
révélaient son potentiel de Foi et d'Histoire, associant les Amis de Léoncel,
dont le but est
culturel, et la COSME, au service du rayonnement spirituel. Mais la COSME n'est
pas à
court de projet.
"Abbaye de Léoncel" est un lieu-dit, ce n'est pas une abbaye, et les
Offices monastiques se sont tus Léoncel n'est plus une paroisse, mais un relais de la paroisse
"Sainte Marie du Royans Vercors". Pourtant son potentiel de nature, de culture, de spiritualité
demeure Des concerts,chaque été, en font une salle recherchée, dérogeant pendant quelques heures
à sa fonction liturgique, pour des moments de grande beauté. L 'Abbaye de Léoncel'
attend un nouveau souffle Que l'Europe vienne la prendre par la main:. Léoncel, Site d'Europe, Léoncel,Sanctuaire d'Europe
Soeur Marie Françoise
Giraud
le 15 novembre 2003