Un lent déclin...et des épreuves


 Mais malgré tout cela  au  XIVè-siècle- Léoncel n'arrive plus à se défendre , les dons cessent, les moines sont moins nombreux, le patrimoine s'amenuise... et l'esprit religieux ne cesse de s'affadir.

Une longue lutte met aux prises l'évêque de Die à celui de Valence..et ce dernier avec les comtes du Valentinois.
Pour se mettre à l'abri des ravages et des pillages les moines demandent alors protection aux dauphins du Viennois.

En 1346 une terrible famine sévit dans la région pendant suivie en 1348  par la Peste noire qui n'épargne pas les moines . Toutes les forces vives de l'abbaye sont consacrées désormais à la défense des biens

la peste noire à Venise



En 1357. les trop fameux «ROUTIERS» saccagent le Dauphiné, après la peste et la famine qui  a sévit  ces bandes de soldats pillards " libérés" après la guerre de Cent ans : les "Bretons", puis les hommes de Raymond de Turenne mettent à sac l'abbaye en 1389-1390. 
Plusieurs bâtiments sont incendiés, les récoltes dévastées et les troupeaux pillés et volés.
Les moines se réfugient à Romans ( où ils avaient acquis une maison) et à la Part Dieu pendant une trentaine d'années. le temps de reconstruire 
A cette époque il y avait dix religieux capitulaires.

 

 

Mais désormais trop peu nombreux et appauvris pour un redressement rapide ils envisagent  au chapitre général de 1397 de s'unir avec l'abbaye cistercienne de Vernaison ( à côté de Chateauneuf sur Isère) 
Cela ne se fait pas
et désormais moins soucieux de travail manuel et en manque d'effectifs ils mettent en fermage leurs terres pour ne conserver en propre que les "réserves de Léoncel" une dizaine d'hectares proches de l'abbaye.

Partout ailleurs , même dans la "grand grange " en face de l'abbaye, ils établissent des fermiers laïc ou des "albergataires" (fermiers qui peuvent accéder peu à peu à la pleine propriété)... d'où le sévère rappel à l'ordre lancé 1355 par le pape Benoit XII alors en Avignon.

 

Palais de Papes à Avignon



1420, de nouveau les moines avec ténacité remontent à Léoncel. Ils sont quatre plus l'abbé. 
Ils relèvent les ruines, récupèrent leurs terres à force de procès. Ces procès  qui pendant des siècles empoisonneront la vie de l'Abbaye...
.
en 1457 la vie régulière a repris. Il y a alors 8 moines plus l'abbé.
et 1492 ils ne sont  plus que  6
en 1513  ils sont 18 
mais en 1519 seulement 10 sur place... auxquels il convient d'ajouter ceux qui résident en permanence à la Part- Dieu

Un redressement s'opère lentement, les défrichement reprennent et le prestige spirituel de Abbaye redevient suffisamment grand pour susciter à nouveau les donations matérielles mais aussi des âmes et des personnes

 


SEPTEMBRE 1567.  c'est la guerre entre les catholiques et les protestants: les guerres de religion 

 

Massacre de la Saint Barthélemy


Le Baron des Adrets ( protestant) prend VALENCE et sa région.
L'Abbaye est à nouveau dévastée. Les granges nombreuses sont saccagées.
L'Église  est pillée et son abside s'écroule.... 
Les moines ont eu le temps de partir et d'emporter les objets liturgiques précieux et les vases sacrés.
L'abbé de Léoncel se réfugie de nouveau à Romans...puis à Lyon ! 
A Romans où la ligue fidèle au pape s'organise. les moines de Léoncel y adhèrent

 

1576. nouveau retour....triste spectacle : L'Église est dépouillée, dégradée ...
l'aile au levant sera restaurée. Le reste demeure à l'abandon.
Quelques convers et domestiques résident seuls à l'abbaye, les cinq moines capitulaires eux sont à la Part-Dieu

En dépit de la "protection et de la sauvegarde" du roi Henri III l'abbaye a subit de plein fouet les malheurs de la guerre et les fléaux qui l'accompagnent : jacquerie au Cognier avec mise à feu des bâtiments et saccage des cultures et dispersion des troupeaux, la peste qui ravage à nouveau  la région en 1586 provoquant la mort de 350 personnes liées de près ou de loin à la communauté.

 

Restes de la ferme du Cognier près de Chabeuil

 

 

Portrait d'Henri IV



1591. HENRI IV confisque l'abbaye car elle s'était allié à la ligue.... mais la rendra après sa conversion. 
Cependant la vie régulière a cessé.
les  derniers abbés pratiquent l'absentéisme systématique... et résident dans la plaine...certains à Romans voire La Mure, Valence ou Grenoble !
Les prieurs eux aussi ne résident que temporairement sur place...préférant La Part Dieu
et les effectifs chutent
on compte 5 religieux en 1607
4 en 1645
6 en 1651 grâce à l'apport de 2 novices de Cîteaux ( plus 1 convers et un valet !)
3 en 1654

 

 

Les derniers errements de la commende...et la fin de l'abbaye


1681. l'abbé régulier Marc Giraud de Riverie le dernier d'une succession de 54 abbés  est inhumé à Léoncel 
Quatre abbés commendataires se succèdent...

Ils pratiquent la "commende" c'est à dire qu'ils confient à un "rentier" ou fermier général le soin de gérer le domaine de l'Abbaye, d'en percevoir les revenus et d'en remettre une part aux religieux... et à eux même...tout en se transformant dès lors en "gentleman-farmer"

Alors qu'ailleurs en France la "querelle des observances" qui oppose les partisans de la stricte observance se répand depuis Châtillon en Champagne et Clairvaux et préconise l'abstinence de toute viande, le retour au travail manuel et la clôture la plus stricte , elle ne  semble pas les affecter outre mesure les abbés de Léoncel..
Vivants comme de grands Seigneurs avec un certain faste et manifestants plus ou moins d'intérêt à la communauté monastique mais par contre beaucoup plus à l'administration financière du domaine, perpétuellement en procès avec les religieux pour accroître la part des revenus qui leur est du, obtenant même que le beau domaine de la Part Dieu leur soit cédé à titre personnel et obligeant les autres moines à remonter à Léoncel pour y demeurer toute l'année les abbés commendataires de Léoncel prospèrent
 
Sur place un prieur gère l'abbaye. 
Le choeur, le cloître, le réfectoire et le dortoir sont restaurés
pour permettre l'hivernage ainsi que toute la partie sud qui était encore visible au milieu du 20ème siècle

 

Carte postale de 1929 montrant bien la partie sud qui avait été refaite en 1681 ( sur la droite)

 

Carte de 1935 dont le cliché montre l'aile sud refaite ( à gauche) et Est

 

 

En 1726 l'abbé de Citeaux Edmond Perrot vint visiter en personne Léoncel et y exhorta les religieux à reprendre la vie régulière... en vain
Tous continuèrent une vie fort relâchée à commencer par le prieur lui même auquel la solitude pesait... et qui ne résidait plus non plus à l'abbaye. 
Voulant transférer à nouveau la communauté ailleurs il songea à nouveau à la Part-Dieu... mais qui était désormais possession personnelle de l'abbé et en même temps évêque de Valence . Il ne voulut point se dessaisir d'un excellent domaine .

Des familles furent appelées sur place pour cultiver les propriétés souvent à l'abandon, et elles constituèrent le premier village de Léoncel. La population totale était alors de 400 âmes.

 La "communauté" demeurée sur place, secouée par de graves crises morales ( un moine prieur impliqué dans un assassinat) et harcelée par des conflits de voisinage incessants et des procès s'avère incapable de créer un haras à Ambel comme ils en avaient eu l'intention.

les effectifs chutent de manière régulière
10 en 1681
6 en 1698
4 en 1709
6 en 1730
5 en 1745
4 en 1771
3 en 1790

Les moines restants descendent alors définitivement  à MONTELIER., où ils devaient rester encore 20 ans.
Un seul restera sur place faisant fonction de curé. 
Il n'y a plus de communauté. 
Le prieur lui alla loger chez des amis et sa conduite scandaleuse le fit déposer et envoyer en pénitence à l'abbaye de Bonlieu ( à côté de Montélimar)

 

une grange dans la plaine, au fond les hauteurs du Vercors

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